La
documentation cinématographique algérienne est indigente. Aussi, « Les
fenêtres grand ouvertes, entretiens avec Rabah Bouberras » de Mouloud
Belabdi a-t-il toute son importance.
Ce
« document » (de référence!) qui vient de paraître aux éditions
BEROAF (Montréal) nous présente un cinéaste algérien, contraint, comme beaucoup
de ses pairs, à l’exil, un passionné du septième art, un homme amoureux de son
métier. Mais c'est aussi un professionnel terriblement déçu par la trajectoire
prise par le cinéma algérien, aujourd’hui moribond.
« Les
Fenêtres grand ouvertes » est aussi un vieux rêve du cinéphile qu'est
Mouloud Belabdi, ancien journalise à la Chaîne 3. Faute d'avoir eu le temps
de réaliser un vieux projet, le bilan du cinéma algérien, Belabdi donne la
parole à son ami Bouberras au détour de multiples virées dans la belle
métropole Montréal où les deux passionnés sont installés.
Avec
Rabah Bouberras, le temps de souvenirs, d'anecdotes et de digressions, le
lecteur et surtout le cinéphile sont transportés dans une ambiance que les
nostalgiques de la cinémathèque algérienne des années 70 et 80 n'auront aucun
mal à se remémorer et que, sans nul doute, ils regrettent aujourd'hui.
L’auteur
fait parler Bouberras de lui-même, de sa passion et de son parcours. Le
réalisateur de Sombrero, de Sahara blues et de Vague après vague, revient ainsi
sur ses premiers pas dans le métier et sur son passage à la RTA avant son
départ pour l'Institut de cinéma de Moscou (VGIK). Un rêve pour le jeune lycéen
et cinéphile qui se réalisait et lui ouvrait les voies de la création
cinématographique.
Mais
il parle aussi de cet adolescent et d’un «coup de foudre» pour cet art : « Ma
passion pour le cinéma est née d’un coup de foudre pour un film, plus
précisément pour un plan de ce film que j’ai vu un dimanche de l’été 1966
à la salle Le Français de la Cinémathèque algérienne. »
Ce
film est Cléo de cinq à sept d'Agnès Varda , cinéaste qu’il rencontrera,
d’ailleurs, trente-neuf ans après à Montréal et à laquelle il confiera comment,
adolescent. il a rencontré sa...passion.
C’est
le cœur gros que Bouberras évoque la situation actuelle du cinéma algérien.
Pour lui, « le cinéma algérien n’existe plus » et d’argumenter : « non
seulement maintenant on ne fait plus rien (...) et tout ce qui a été créé est
en train d’être perdu (…) Si je voulais faire un travail sur le cinéma algérien,
je ne pourrais pas voir des films comme Noua, L’incendie, La nuit a peur du
soleil, Une si jeune paix… »
Le
cinéma algérien n’existe plus. Pourtant, des Algériens réalisent des films et
rencontrent le succès. C’est le cas entre autres de Rachid Bouchareb, de Nadir
Mokhnache ou encore de Merzak Allouache. Alors? Niet ! répond Rabah Bouberras :"leurs
films sont des films français (…) ce sont des réalisateurs de talent. Mais
sincèrement, j’ai de la difficulté à classer leurs films comme des œuvres
algériennes. Ce ne sont pas des produits algériens, ils ne sont pas destinés au
public algérien.’’
C’est
quoi au fait un film algérien? Ceux qui auront la chance d’aller jusqu’au bout
de la bobine ‘’Fenêtres grand ouvertes… ’’ auront sûrement une réponse.
Mouloud
Belabdi est également l’auteur de Mandala
(Éditions Fennec –Algérie, 1994), Intensément
la vie- Cycles et Chant de la douleur
et de l’espérance algérienne (Fondation littéraire Fleur de Lys, Lévis
(Québec, 2005).
A-Kader
Rahli*
* Ancien
journaliste à l’agence de presse APS, il a été rédacteur en chef de l’Est républicain.
Il collabore à diverses publications en Algérie et au Canada.
** L'article est paru dans le huffington post algerie en date du 14 novembre 2014.
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