M. Mouloud Hamrouche |
Le danger
qui n'est pas encore venu
peut être évité.
Ancien proverbe hindou
La
gravité de la situation politique en Algérie a fait sortir de son silence, l’ancien
premier ministre, Mouloud Hamrouche. L’homme qui avait commencé des réformes
courageuses de 1989 à juin 1991 revient sur le devant de la scène politique
algérienne en s’adressant directement, dans une lettre ouverte, aux décideurs. En
d’autres termes, à l’armée, au noyau dur qui détient le pouvoir réel, celui de
la force militaire et, partant de toute force politique.
C’est que la situation
est grave, très grave. Elle nous rappelle par certains côtés, la situation qui
a forcé en 1998, le président Zeroual à démissionner, au plus fort du
terrorisme.
Aujourd’hui,
le contexte a certes changé. Mais les fondements de la crise demeurent. Ce n’est
pas un hasard, si aujourd’hui, « on » s’attaque à une des communautés
des plus paisibles en Algérie, la communauté mozabite à Ghardaïa. Ce n’est pas
un hasard, que le « terrorisme résiduel » soit encore entretenu en
Kabylie. Ce n’est pas un hasard que l’on parle d’Al-Qaïda dans certaines
régions du Sud algérien. Ce n’est pas un hasard que des partis politiques ou
des personnes appellent un président en fin de vie à se représenter pour un quatrième
mandat quitte à ce qu’il reste sur un fauteuil roulant. L'Algérie ne mérite pas ce scénario macabre au
21ème siècle !
Il suffit désormais d'un rien pour que tout s'enflamme.
Il suffit désormais d'un rien pour que tout s'enflamme.
M. Hamrouche
n’a pas, de mon point de vue, de visée présidentielle
dans les circonstances présentes que vit douloureusement le peuple algérien. Il
voit plus loin que l’échéance du 17 avril. Il appelle les décideurs, l’armée, à
se ressaisir avant qu’il ne soit trop tard.
Dans
toute société, un pouvoir politique ne peut pas survivre sans contre-pouvoir.
Un homme militaire, politique ou simple administrateur doit rendre des comptes devant
ses pairs et devant la société. Les libertés d’expression, de croyance et de
religion doivent être protégées pour que l’on puisse passer à un stade
supérieur de la réflexion sur le devenir du pays. La jeunesse ne doit pas être
oubliée. Comment lui redonner l’espérance quand l’avenir est bouché ? L'éducation doit être revue et mise au diapason des grands défis du siècle.
Il y a aussi d'autres impératifs.
Il y a aussi d'autres impératifs.
L’Algérie
nécessite, pour sa survie, un nouveau compromis historique.
Ainsi
que M. Hamrouche le souligne lui-même : « Chaque crise a ses victimes
et ses opportunités. Évitons de gâcher ces nouvelles opportunités ou d’avoir de
nouvelles victimes. »
C’est
pour toutes ces raisons et d’autres que je n’ai pas citées que je publie, ici,
le message d’espérance et de mise en garde de M. Mouloud Hamrouche :
Déclaration de M. Mouloud HAMROUCHE
Ancien chef de gouvernement
Notre
pays vit des moments sensibles qui vont conditionner son avenir immédiat et
profiler irrémédiablement son devenir, au-delà de la présidentielle,
indépendamment du fait que le Président soit candidat ou pas, par l’arrivée de
nouvelles générations aux postes de responsabilité.
Pour
que notre pays vive ces échéances dans la cohésion, la sérénité et la
discipline légale et sociale, il est primordial que les différents intérêts de
groupes, de régions et de minorités soient préservés et garantis. De même qu’il
est impératif que l’État préserve tous les droits et garantisse l’exercice de
toutes les libertés. Ceci est essentiel pour assurer la sécurité, renforcer les
avancées, corriger les distorsions, et éliminer les failles.
Faut-il
rappeler ici et maintenant que la renaissance de notre identité algérienne et
notre projet national ont été cristallisés, abrités et défendus,
successivement, par l’Armée de Libération Nationale, puis l’Armée Nationale
Populaire ?
Cela
n’a été possible que grâce aux hommes qui ont su trouver des compromis et
élaborer des consensus. À chaque étape et à chaque crise, ces hommes ont su
préserver l’unité des rangs, la discipline et transcender tout clivage
culturel, tribal, régional en préservant l’identité et le projet national.
Faut-il
convoquer aujourd’hui, la promesse d’édifier un État moderne qui survit aux
hommes, aux gouvernements et aux crises ? Faut-il rappeler encore l’engagement
pris de poursuivre le processus démocratique ? Faut-il invoquer la promesse de
continuer la réforme ?
Nos
constituants sociaux ne peuvent s’accommoder de pouvoir souverain sans
contre-pouvoir. Il ne peut y avoir d’exercice d’un pouvoir d’autorité ou de
mission sans habilitation par la loi et sans un contrôle. Il y va de l’intérêt
et de la sécurité de l’Algérie, de tous les Algériens et de toutes les régions
du pays.
C’est
à ces conditions que notre Armée Nationale Populaire assurera sa mission plus
aisément et efficacement et nos institutions constitutionnelles assumeront
clairement leurs rôles et fonctions.
C’est
à ces conditions aussi que notre peuple persévérera dans la voie du progrès, de
l’équité et de la solidarité entre toutes ses composantes sociales, et
appréhendera les enjeux, tous les enjeux et relèvera les défis, tous les défis,
d’aujourd’hui.
C’est
à ces conditions que notre État demeurera crédible, sérieux et fiable pour ses
partenaires et ses voisins.
Chaque
crise a ses victimes et ses opportunités.
Évitons
de gâcher ces nouvelles opportunités ou d’avoir de nouvelles victimes.
Alger
le 17/2/2014
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